JEROME PIETRI: Last Of The Fishing Days (2021)

Le guitariste-compositeur-interprète Jérôme Pietri nous enchante une nouvelle fois. Après son album Blues « roots » en mode homme-orchestre "Little Blues Story" (2007), puis le très élaboré et éclectique "Gone Fishin" (2014), nous avons à présent ce " Last Of The Fishing Days " à la démarche éco-responsable qui met en exergue la « plastisphère », miroir de notre ingratitude envers Mère Nature, et dont la pochette reflète bien le sujet. Elle rappelle aussi l'affiche du film « Delivrance » de John Boorman en 1972 à une époque où l'eau était plus limpide. Concernant le contenu musical, Jérôme Pietri ne rigole pas en sortant de l'eau la Gibson ES-345 Cherry en guise d’arme fatale, mais aussi en maniant avec allant la gaffe avec au bout un poisson électrique très vivace qui irradie par un fort feeling tout au long de l'album avec des morceaux solides, variés, accrocheurs. Il le démontre en ouverture par "Monkey On My Back" avec rasade de slide à l'empreinte Allman Bros version Warren Haynes, avec en prime un intermède jazzy du plus bel effet. Puis arrive "Plastic Island/The 7th Continent" avec son groove pesant et inquiétant aux effluves psyché reflétant la triste réalité de cette grosse merdasse de déchets, ensuite un déluge de six cordes en fusion s’abat sur "If It Bleeds It Leads" et "Rabid Dog". Suit un sautillant Blues-Boogie bien mordant nommé "Fishing In The Rain" pour conjurer le sort, et après coup une étonnante reprise du Floyd, le mythique "Money" nappé d'une pointe de « Texas Shuffle » « made in El Diablo ». Jérôme pousse ensuite le bouchon via le Mississippi pour du Hill Country Blues à faire rougir les Black Keys sur le formidable "Blood Money". Après ceci, pour ravir son auditoire, rien de mieux qu'un bon « Swing Boogie Jazz » d'une grande maîtrise guitaristique avec "Big Brother Boogie" lorgnant sur Danny Gatton ou Ray Benson/Asleep at the Wheel, et pour achever son monde deux titres de fin fulgurants, "Collagen Woman" et "Trophy" où la guitare de Jérôme fait mouche techniquement. Un coup de chapeau à la voix féminine de Fabienne Della Monique qui accompagne Jérôme Pietri, au bassiste François Blanc, et à son vieux compère le batteur Christian Boragno, rescapé du trio Blues Rock auvergnat EL DIABLO, sur cet album "Last Of The Fishing Days" qui impose le respect, cadeau idéal de fin d'année.

Jacques Dersigny